Les Éditions Camion Blanc

Les Éditions Camion Blanc, fondées par Sébastien Raizer et Fabrice Revolon et à l’origine de la collection « Camion Noir », seraient-elles le Janus bi-front de l’édition française ? D’un côté, sous l’enseigne « Camion blanc », elles se présentent comme « l’éditeur qui véhicule le rock » ; de l’autre, avec la griffe « Camion noir », son autre intime, elles s’affichent comme « l’éditeur qui véhicule le souffre ». D’un côté, les arcanes, les abîmes, les affres et les visages du rock, de l’autre, les manifestations différenciées et dérangeantes de la zone d’ombre de la culture occidentale, essentiellement depuis le XXe siècle. Mais la séparation-distinction n’est en réalité qu’apparente, tout au moins peut-on dire qu’elle n’est pas si hermétique que cela et qu’il y a perméabilité, porosité entre les deux entités, un peu comme le partage que présente le symbole du Yin-Yang. Il y a en effet du « Camion noir » (mouvements gothiques, mouvements païens, la scène hardcore,) chez « Camion blanc », comme il y a du « Camion blanc » (black metal, néofolk, rock’n’roll) chez « Camion noir ». Cela revient à dire, et l’on s’en doutait un peu, que le rock est l’élément qui fait lien et passerelle entre les deux.
Cet éditeur basé en Lorraine, à Rosières-en-Haye, publie aussi bien des essais, des entretiens, des confessions, des anthologies, des romans que des traductions. Nombre de textes sont inédits et pour certains difficiles à trouver ailleurs. On découvre en particulier quelques livres cultes comme Au delà de l’avenue D, de Philippe Marcadé, le Magia sexualis, de P. B. Randolph, ou encore Le Livre de la Loi, d’Aleister Crowley.
Les thèmes abordés par « Camion blanc », dont le catalogue contient environ 115 titres, sont, à côté des nombreuses analyses de la vie et de la musique de certaines idoles rock (entre autres, Johnny Cash, Patti Smith, Iggy Pop, John Lennon, Nick Drake, Bon Scott, Ian Curtis, Syd Barrett, Jimi Hendrix, Kurt Cobain, Pascal Comelade, Sid Vicious, Serge Gainsbourg, Ozzy Osbourne, Noir Désir, The Beach Boys, Kraftwerk, The Velvet Underground, Led Zeppelin, Nine Inch Nails, Metallica, Tool, The Yardbirds), des anthologies (Rock progressif, Metal), des études de styles (New Wave, Punk, Musique industrielle), des études thématiques diverses (références littéraires et cinématographiques dans la musique, les chansons à guitare, l’histoire des DJ, le gangsta rap, les dérives du rock) mais aussi la présentation de quelques « medias » (le label Sordide Sentimental, Slayer Mag, le fanzine Atem).
Quant à « Camion noir », ses 54 titres proposent de pénétrer dans des territoires aussi divers que le monde des sorcières, le cinéma « maléfique » de David Lynch, l’univers des vampires, les faces occultes du nazisme, l’Église de Satan d’Anton LaVey, la magie noire, les annonciateurs d’apocalypses, le traité Hagakure ou encore les tueurs en série. On trouve aussi des ouvrages présentant le parcours et la personnalité de certains personnages plus ou moins connus mais ayant tous défrayé la chronique : l’énigmatique réalisateur J. X. Williams, l’actrice porno mineur Traci Lords, la comtesse tueuse en série Erzsebeth Báthory, le gourou meurtrier Charles Manson, le bluesman « diabolique » Robert Johnson ou celui qui fut surnommé « le Raspoutine de Himmler », Karl Maria Wiligut.
Au vu de toutes ces thématiques ne concluons pas trop vite à une fascination pour le morbide et la noirceur, à un désir de provocation ou de sensationnalisme. Les textes sont généralement sérieux et de qualité. Il s’agit plutôt pour l’éditeur de faire découvrir tout un pan, refoulé ou méconnu, de la culture occidentale. L’important est toujours de s’informer pour comprendre. Le pari de cette maison d’édition est courageux.

http://www.camionnoir.com (site officiel)
http://www.camionblanc.com (site officiel)



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